Dans le n° 103 de Brèves, G.-O. Châteaureynaud pose la question suivante : Quels ont été vos maîtres, quels auteurs, estoniens ou étrangers, ont contribué à votre formation d’écrivain ? Que vous ont-ils apporté ? A contrario, quelles influences avez-vous consciemment écartées, comme étrangères à votre sensibilité, ou à votre conception de la littérature ? Parmi les auteurs étrangers, je pourrais citer en vrac : Gogol, Boulgakov, Dostoïevski, Hermann Hesse, Pu Songling, Kafka, Patrick Süskind, García Márquez, Pessoa, Lewis Carroll, Otfried Preussler, les frères Grimm, Montaigne, Bergson, Michel Foucault, Italo Calvino, Dino Buzzati, Milorad Pavi, Borges, Isaac Bashevis Singer, Heidegger, Schopenhauer, Cioran, Huysmans. Du côté estonien : Tõnu Õnnepalu (Emil Tode). Mais aussi de nombreux autres. Ce qui m’inspire avant tout, ce sont les textes visionnaires caractérisés par un haut niveau de style et de pensée, que ce soient des ouvrages philosophiques, littéraires ou de vulgarisation scientifique. C’est de là que vient ma conception du réalisme magique : pour moi, n’importe quel texte peut relever du réalisme magique, dès lors qu’il pénètre directement dans l’âme du lecteur et y met en route une sorte de processus alchimique. S’il y a un endroit où l’alchimie est possible, c’est justement au centre de ce labyrinthe sensitif de l’homme qu’on appelle l’âme. En ce sens, je considère par exemple comme du réalisme magique Les âmes mortes de Gogol, les nouvelles de Tchékhov et de Borges, L’évolution créatrice de Bergson, l’Histoire de la folie de Foucault, Les frères Karamazov de Dostoïevski, Le château de Kafka et Sur la route de Kerouac, parce que la lecture de ces oeuvres m’a transformé intérieurement. Je suis ressorti de ces livres purifié, chargé d’énergie, changé en tant qu’être humain. Et de quoi s’agit-il, sinon d’alchimie, de magie ? Je considère que Schopenhauer, Freud, Jung, Kafka, Dostoïevski, Darwin, Calvino, Cioran et Bergson sont à la fois de grands écrivains et de grands philosophes. Mais avant tout, ce sont des alchimistes du verbe. Ils parviennent à écrire de telle sorte que le lecteur se laisse ensorceler et accepte tout ce qu’ils écrivent, même quand un examen ultérieur plus attentif révèle que beaucoup de leurs idées sont excessives ou étranges. Laisser un commentaire Annuler la réponse Votre adresse e-mail ne sera pas publié.CommentaireNom* Email* Site Web